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Un mois de guerre au Nagorny Karabagh : la paix se fait attendre sur le front
Iliya Pitalev / Sputnik / Sputnik via AFP

Un mois de guerre au Nagorny Karabagh : la paix se fait attendre sur le front

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Par , envoyée spéciale sur place.

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Cela fait exactement 30 jours que la guerre fait rage au Nagorny Karabagh. Le bilan humain a dépassé les 1.000 morts côté arménien et les forces azerbaïdjanaises progressent sans qu’aucune trêve ne tienne. La crainte d'un siège du corridor de Latchin fait craindre le pire à quelques jours de nouveaux pourparlers de paix qui doivent s'ouvrir ce jeudi à Genève.

Les abris de la troisième ligne de front sont déserts près de Martouni, à l’est du Nagorny Karabagh. Il ne reste que quelques bouteilles d’eau, traces d’une présence militaire récente. « Les soldats étaient encore là hier. Ils ont dû partir ce matin mais on ne sait pas pourquoi » explique le garde de l’escorte. Les obus et les roquettes SMERCH fusent au-dessus des tranchées de terre sablonneuse. Ils s’abattent régulièrement sur les environs de la ville, aujourd’hui ravagée par la troisième guerre du Nagorny Karabagh qui oppose Arméniens et Azerbaïdjanais, soutenus par la Turquie depuis le 27 septembre.

Au fond d’un ravin, dans un abri, une dizaine de soldats arméniens tiennent la position. Pour Saro, un volontaire originaire de la région, affecté sur ce poste depuis une semaine, le troisième cessez-le-feu entré en vigueur lundi 26 octobre à 8 heures « n’a rien changé ». Ce jeune, rappeur, explique calmement : « De toute manière, on ne s’attendait à rien. On se battait quand un officier a appelé et nous a ordonné d’arrêter de bombarder. Deux ou trois heures plus tard, des amis de Stepanakert nous ont appris qu’un nouveau cessez-le-feu avait été signé. On était contents car on a pu se reposer un peu. Mais, on se demande toujours combien de temps cela va bien pouvoir durer ». Et cette trêve, comme les deux précédentes des 10 et 17 octobre, a été de courte durée : quarante-cinq minutes exactement.

Les forces azéries gagnent du terrain

Les forces azeries progressent, un fait que même Erevan ne peut plus nier. Lundi soir, Artsrun Hovhannisyan, le représentant du ministère de la Défense arménien, reconnaissait les percées ennemies : « Ils ont avancé sur certaines positions et se sont approchés des portes de Syunik (région arménienne frontalière) mais la situation n’est pas désastreuse. Souvent, nous quittons [certaines lignes de front] parce que les vies humaines sont précieuses. Mais, se replier vers de nouvelles lignes de front n’est pas fatal. La situation est grave, la guerre fait rage mais ce n’est pas insurmontable ». Le militaire a d’ailleurs confirmé l’offensive azerbaïdjanaise en direction du corridor de Latchin. Selon les deux camps, les forces azéries se trouveraient à une soixantaine de kilomètres de cette route stratégique. Cette voie vitale, qui relie Goris en Arménie à Stepanakert, capitale du Nagorny Karabagh, se trouve au cœur des territoires azerbaïdjanais conquis par l’Arménie en 1994.

Si Latchin tombe, alors Stepanakert et tout le Nagorny Karabagh se trouveront en état de siège. De quoi renforcer l’ascendant de Bakou lors d’éventuelles négociations de paix. Après Moscou et Washington, jeudi 29 octobre, c’est à Genève que les ministres des Affaires étrangères d’Arménie et d’Azerbaïdjan se rencontreront à nouveau, sous l’égide des co-présidents russe, américain et français du groupe de Minsk de l’OSCE. Une nouvelle fois, les diplomates tenteront de parvenir à un accord pour engager un règlement pacifique du conflit. Sur la ligne de front, dans la pénombre d’un baraquement, les soldats arméniens, fatigués par un mois de guerre d'artillerie, « espèrent » comme Saro « que la paix advienne par les négociations et non la guerre. Avec l’aide de Dieu et de la communauté internationale, il y aura la paix ».

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Natacha Polony, directrice de la rédaction de Marianne