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« Ce qui importe surtout aujourd’hui à Erdogan est de porter un coup de massue à la société civile moderniste, laïque et aspirant à la démocratie »

Avec la condamnation du philanthrope Osman Kavala à une perpétuité incompressible, le président turc nargue l’opinion internationale et veut afficher la puissance d’Ankara, analysent les chercheurs Ahmet Insel et Nora Seni dans une tribune au « Monde ».

Publié le 04 mai 2022 à 11h16 Temps de Lecture 3 min. Read in English

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Conforté par le rapprochement avec les puissances occidentales à l’occasion de la guerre contre l’Ukraine, le président turc Recep Tayyip Erdogan se sent libre de poursuivre dans son pays une politique de criminalisation de toute contestation et de répression tous azimuts. Ainsi le philanthrope Osman Kavala a été condamné à la perpétuité incompressible, à l’issue d’un procès où le droit a été bafoué allégrement aussi bien sur la forme que sur le fond de l’aveu même d’un des trois juges du tribunal pénal qui s’est opposé à ce verdict et a réclamé l’acquittement et la libération de l’accusé.

Détenu depuis le 1er novembre 2017, Osman Kavala est accusé de tentative de « renversement du gouvernement » en programmant, dirigeant et finançant les événements de Gezi, du nom de ce soulèvement populaire provoqué par le projet de réaménagement du parc du même nom, au centre d’Istanbul en mai-juin 2013. Sept autres prévenus, dont trois femmes, sont condamnés à la réclusion pour dix-huit ans pour « avoir aidé » Osman Kavala. Avocat, urbaniste, architecte, cinéastes, dirigeants d’université et d’ONG, ils comparaissaient libres. Ils ont été incarcérés le soir même du verdict.

Or, en février 2020, un autre tribunal pénal avait acquitté tous les prévenus de ce même procès en soulignant qu’aucune preuve concrète n’accompagnait l’épais réquisitoire du procureur pour justifier ses accusations. Mais quelques heures avant sa libération à l’issue de la décision d’acquittement, Osman Kavala était arrêté sur ordre du procureur d’Istanbul avec deux nouvelles accusations échafaudées à l’occasion : espionnage et participation à la tentative du coup d’Etat de juillet 2015. Le président turc était intervenu pour contester la décision d’acquittement, comme il était intervenu auparavant plusieurs fois publiquement contre Osman Kavala, alors que son procès était en cours.

Aujourd’hui, ce qui n’est plus qu’une mascarade de justice prend une tournure tragique avec la condamnation à perpétuité d’Osman Kavala pour les chefs d’accusation dont il avait été acquitté, comme tous les autres prévenus, il y a deux ans. Il est cette fois-ci acquitté des accusations d’espionnage inventées par ce procureur, promu depuis membre de la Cour constitutionnelle. Kafka lui-même aurait eu du mal à imaginer un tel procès.

Lire aussi l’éditorial du 24 février 2020 : Turquie : Osman Kavala doit être libre

La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la Turquie pour la détention abusive d’Osman Kavala et elle a décrété la nullité des preuves portées à charge contre lui. Au nom de l’indépendance des tribunaux turcs et de leur souveraineté (!), Recep Tayyip Erdogan avait invité les juges à ne pas suivre l’arrêt de la CEDH. De son côté, le Conseil de l’Europe a entamé une procédure de sanction contre la Turquie pour le non-respect de la décision de la CEDH, mais la procédure est bien longue.

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