Il y a bel et bien un « problème turc » à l’OTAN et, après l’avoir longtemps escamoté, le secrétaire général, Jens Stoltenberg, l’a lui-même mis sur la table, jeudi 22 et vendredi 23 octobre, lors d’une réunion − par visioconférence − des ministres de la défense de l’Alliance. Le sujet ne figurait pas explicitement au menu des discussions, mais la multiplication des contentieux avec Ankara obligeait le diplomate norvégien à sortir de ses commentaires prudents sur ce qu’il se bornait jusqu’ici à désigner comme « un allié précieux ».
L’offensive unilatérale contre les Forces démocratiques syriennes et les milices kurdes dans le nord de la Syrie en 2019 ; les forages dans les eaux territoriales chypriotes et grecques en Méditerranée orientale ; la contribution à la violation sur les armes à destination de la Libye et l’incident avec une frégate française tentant de contrôler cet embargo, ou encore la récente implication dans le conflit du Haut-Karabakh, avec même l’acheminement de mercenaires syriens : la multiplication des initiatives turques, et les tensions consécutives avec plusieurs alliés, fait que, désormais, « il y a un éléphant dans la pièce, et il est de plus en plus gros », selon la formule d’un diplomate otanien.
Sanctions
Un dernier élément, non négligeable, s’est ajouté à cette liste de problèmes : le président, Recep Tayyip Erdogan, a confirmé, vendredi, ce que des médias turcs évoquaient depuis une semaine : son pays a bien effectué un essai des missiles S-400 qu’il a achetés à la Russie, en dépit de toutes les mises en garde que lui avaient adressées ses alliés. « Ces essais vont continuer », a indiqué M. Erdogan, dans un message adressé notamment aux Etats-Unis.
La réponse américaine ne s’est pas fait attendre. Le ministère de la défense américain a condamné « dans les termes les plus forts » le test effectué par la Turquie, le 16 octobre, du système de défense aérienne S-400. « Nous nous opposons à ce que la Turquie teste ce système, cela risque d’avoir des conséquences graves pour nos relations de défense », a averti le porte-parole du Pentagone, Jonathan Hoffman.
Quand la première batterie de missiles avait été livrée, Washington avait en effet suspendu la participation turque au programme de développement de l’avion de guerre F-35, estimant que le système des S-400 permettrait d’en percer la technologie. Avant la confirmation du premier essai, le secrétariat d’Etat américain avait estimé que cette opération serait incompatible avec le rôle d’Ankara au sein de l’OTAN et son statut de « partenaire stratégique » des Etats-Unis.
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