La cheffe de la diplomatie française, Catherine Colonna, en visite à Bakou, a estimé, jeudi 27 avril, qu’il était « possible d’en finir » avec le conflit au Haut-Karabakh qui oppose l’Azerbaïdjan à l’Arménie depuis plus de trente ans, malgré de nouvelles tensions
« La France n’a qu’un objectif et n’a pas d’autre souhait que de contribuer à la paix et trouver le chemin de la paix », a déclaré Mme Colonna lors d’une conférence de presse commune avec son homologue azerbaïdjanais, Djeyhoun Baïramov, qu’elle a invité à Paris afin de poursuivre les discussions. Il s’agit d’un processus « long et difficile mais il est possible de réussir », a-t-elle ajouté.
Mme Colonna, dont la visite est la première d’un ministre des affaires étrangères français à Bakou depuis six ans, a relevé que « sur le corridor de Latchine, nous avons sur ce point une différence de point de vue car nous avons des aspects juridiques ». Elle a estimé qu’il fallait rétablir « la confiance », soulignant que « la région a besoin de gestes qui la nourrissent si l’on veut nourrir le processus de paix » car, selon elle, « la confiance amène les solutions, la défiance les difficultés ».
Dimanche, l’Azerbaïdjan a installé un barrage routier à l’entrée du corridor de Latchine, qui constitue le seul axe reliant l’Arménie à la région séparatiste à majorité arménienne du Haut-Karabakh, une première depuis 2020. Depuis un cessez-le-feu en 2020, la Russie a déployé au Haut-Karabakh un contingent de soldats de la paix censé assurer la circulation sur le corridor de Latchine.
Route vitale
M. Baïramov a défendu jeudi cette décision de Bakou qui a provoqué des critiques internationales, dont celles de Paris. Il a déploré que Paris « n’ait jamais appelé » Erevan pour tenter d’apaiser les tensions, tout en assurant que le corridor de Latchine « restait ouvert ».
Alliée historique de l’Arménie, la France avait fait valoir dimanche que l’installation de ce point de contrôle « contrevenait aux engagements pris » et « portait préjudice au processus de négociation ». L’Arménie a vivement condamné l’installation de ce barrage, après avoir souvent accusé Bakou de bloquer cette route vitale depuis près de six mois.
Le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a appelé jeudi la Russie, médiatrice dans le conflit avec l’Azerbaïdjan, à garder le contrôle de cette route vitale. La mission de maintien de la paix russe « doit contrôler le corridor de Latchine et assurer son fonctionnement », a exigé jeudi Nikol Pachinian, lors d’une réunion gouvernementale. « Personne à l’exception de la Fédération de Russie n’a le droit de contrôler le corridor », a-t-il encore rappelé, assurant que l’objectif de Bakou était « le nettoyage ethnique des Arméniens du Haut-Karabakh ».
Catherine Colonna s’est aussi entretenue jeudi avec le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, au palais présidentiel. A cette occasion, le dirigeant azerbaïdjanais a une nouvelle fois accusé Erevan d’utiliser le corridor de Latchine pour « transporter des armes et des équipements militaires » et affirmé que l’Arménie ne remplissant pas « ses obligations ».
L’Arménie et l’Azerbaïdjan, deux ex-républiques soviétiques du Caucase, se sont affrontés pour le contrôle de l’enclave du Haut-Karabakh lors d’une première guerre au début des années 1990 avant un conflit armé en 2020, remporté par Bakou.
Depuis, les tensions entre les deux pays persistent et des accrochages sporadiques continuent d’éclater dans le Haut-Karabakh, mais aussi à la frontière officielle entre les deux Etats, en dépit des efforts de puissances occidentales et de la Russie pour trouver un traité de paix.
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