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Amères législatives en Arménie

Le parti au pouvoir est menacé à l'occasion des législatives anticipées de dimanche. Ces dernières ont été convoquées à la suite d'une forte contestation déclenchée par la traumatisante défaite militaire au Haut Karabakh, à l'automne dernier, face à l'Azerbaïdjan.

Le Premier ministre, Nikol Pashinyan, est en difficulté pour se succéder à lui-même à l'issue des législatives de dimanche.
Le Premier ministre, Nikol Pashinyan, est en difficulté pour se succéder à lui-même à l'issue des législatives de dimanche. (SOPA Images/SIPA)

Par Yves Bourdillon

Publié le 18 juin 2021 à 11:20

Ce sont des législatives anticipées particulièrement amères qui se déroulent ce dimanche en Arménie. Le Premier ministre, Nikol Pachinian, a dû se résoudre à les convoquer après un ample mouvement de contestation dans la rue, en février dernier, assorti d'appels à sa démission lancés par le chef d'Etat-major et plusieurs généraux, ce qu'il avait dénoncé comme un véritable coup d'Etat militaire.

Cause de la crise politique dans cette petite ex-république soviétique du Caucase de trois millions d'habitants, la traumatisante défaite militaire subie face à l'Azerbaïdjan en novembre dernier. Sous équipée, l'armée arménienne n'avait pas fait le poids face aux Azéris soutenus par la Turquie, aux drones tueurs dévastateurs, et des mercenaires syriens, qui voulaient reconquérir la république autoproclamée du Haut Karabakh. Une enclave grande comme un département français et peuplée intégralement d'Arméniens, mais que Bakou estime lui appartenir depuis 1920.

Le rôle de la Turquie

L'Arménie a perdu 6.000 soldats en six semaines d'un conflit clôt par un cessez-le-feu sous parrainage de Vladimir Poutine, avec l'accord du président turc, Recep Tayyip Erdogan, grand vainqueur de la crise. Erevan a donc non seulement perdu les trois quarts du territoire du Haut Karabakh qu'elle contrôlait depuis trente ans, mais se trouve aussi dépendre plus que jamais de Moscou… Le soutien turc à l'Azerbaïdjan, dictature turcophone enrichie par le pétrole de la mer Caspienne, est d'autant plus traumatisant pour les Arméniens qu'Erevan et Ankara sont à couteaux tirés depuis un siècle. La Turquie, qui a rompu ses relations diplomatiques avec l'Arménie en 1995, refuse de reconnaître le génocide arménien qui aurait fait 1,5 million de morts en 1915-1916, les deux tiers des Arméniens vivant alors dans l'empire ottoman.

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Incertitudes

La campagne électorale s'est déroulée dans un contexte de polarisation extrême de la société et de la classe politique, à grand renfort de marteaux ou de massues brandis par les principales têtes de liste pour illustrer ce qu'elles comptaient faire subir à leurs adversaires après la victoire. Porté par la vague des critiques sur les choix tactiques lors du conflit ainsi que sur le manque de préparation de l'armée arménienne, le bloc d'opposition de l'ex-président (1997-2008) Robert Kotcharian, se trouve au coude à coude avec le parti Contrat civil de Nikol Pachinian, selon les sondages.

Malgré la défaite, le Premier ministre conserve une certaine popularité, pour avoir réformé le pays et s'en être pris aux richissimes oligarques et aux élites corrompues depuis son arrivée au pouvoir à l'issue d'un soulèvement pacifique en 2018. Son bilan économique n'était pas mauvais avant que la pandémie, puis le conflit avec l'Azerbaïdjan ne le détériorent gravement. Les deux formations sont créditées de 24 % des voix. Suit le bloc de l'ex-Premier ministre Serge Sarkissian, renversé en 2018, avec 7,4 %

« Le risque d'affrontements de rue est assez élevé après un vote précédé d'une campagne aussi agressive », regrette l'analyste politique Viguen Hakobian, cité par l'AFP. D'autant que l'Arménie est habituée aux soulèvements post-électoraux. Avant la révolution de 2018, Nikol Pachinian, un ancien journaliste, avait été incarcéré pendant près de deux ans pour son rôle dans les manifestations réprimées dans le sang en 2008.

Yves Bourdillon

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